« TOUS LES FOURNISSEURS DE FAUCHON SERONT PAYÉS »
Sévèrement touchée par la crise, la prestigieuse maison Fauchon vient de placer une partie de ses activités en redressement judiciaire. Entretien avec Samy Vischel Président CEO de la marque.
LMEF- Tout le monde a pu lire que Fauchon était en redressement judiciaire, qu’est-ce que cela signifie réellement ?
SAMY VISCHEL –
Ce n’est pas Fauchon dans son ensemble : cette décision concerne les deux magasins que nous avons au 24-26 et 30 place de la Madeleine. Nous nous sommes placés sous la protection du tribunal de commerce de Bobigny avec qui nous allons travailler dans les prochaines semaines, afin de mettre en place un plan de redressement pour les deux boutiques, et seulement ces deux boutiques, avec les bureaux qui se trouvent dans les étages. Le reste n’est pas concerné, qu’il s’agisse de l’hôtel, du Grand Café, de la boutique de thé et notre business à l’international. Naturellement toutes les livraisons sont garanties et les fournisseurs seront payés. Fauchon honore ses commandes. Nous avons un actionnaire qui nous soutient et c’est important. Fauchon est une marque ultra désirable, elle a résisté à la première guerre mondiale, à la crise de 29, à la seconde guerre mondiale et elle va surmonter cet épisode. Et je dois dire que je suis touché par le nombre de messages de soutien qui m’est adressé depuis que l’information est sortie.
« NOUS PENSONS À DÉMÉNAGER »
LMEF – Peut-on dire que l’entreprise a été victime du Covid
S.V – Du Covid mais pas seulement. Pour mémoire nous avions eu avant le mouvement des gilets jaunes, puis nous avons eu les grèves dans les transports et les manifestations contre la réforme de la retraite. Ce n’était pas supportable : l’épidémie a été le coup de grâce. Pour nos deux magasins, ce sont des chiffres d’affaires de moins 80%. En face nous avons des bailleurs qui ne veulent pas négocier sur la base de loyers très importants et de charges très lourdes. Ces loyers seront notre seule dette. Et cela nous fait nous interroger sur l’opportunité de déménager, d’autant qu’Ikéa et Leroy Merlin se sont installés Place de la Madeleine… Il y a certainement des questions à se poser afin de nous rapprocher d’un environnement qui soit plus favorable aux commerces de bouche. Le temps qui vient va être celui de la réflexion et de la restructuration. Il faut préparer sans attendre le monde de demain et l’on sait déjà qu’il sera forcément différent du monde que l’on a connu.
LMEF – Quand pensez-vous que la reprise pourra s’amorcer ?
S.V – Il est trop tôt pour le dire. Tout dépendra de la crise sanitaire – deuxième vague ou pas ? Vaccin ou pas ? – et du retour de la clientèle étrangère à Paris. Comment vont se comporter les touristes ? Personne ne le sait. Donc on ne peut rien envisager avant Janvier 2021… Et l’on sait qu’il faudra sans doute davantage de temps encore pour retrouver le dynamisme économique que nous avions avant la crise sanitaire.