Récoltes de fruit 2025 fraises manille

Les mauvaises récoltes de fruits inquiètent les artisans confituriers

Selon la Fédération des Industries d’Aliments Conservés (Fiac), l’année 2025 connaîtra « la pire récolte européenne de fruits jamais connue ». Ce qui engendrerait déjà une « explosion généralisée des prix ». Nous avons demandé à la maître confiturière Vérène Indekeu, maître-confiturière à La Cour d’Orgères, adhérente de la Fiac et membre de la Fédération des artisans confituriers de France, quels sont les conséquences de ces mauvaises récoltes de fruits sur l’activité des TPE du secteur.

Le Monde de l’Épicerie Fine – Comment s’expliquent les mauvaises récoltes de fruits de cette année ?

La maître confiturière Vérène Indekeu - La Cour d'Orgères
Vérène Indekeu

Vérène Indekeu – Cette année, la production européenne de fruits a été frappée de plein fouet par les aléas climatiques : gelées tardives, grêle, pluies excessives ou au contraire sécheresses prolongées. Ces phénomènes, de plus en plus fréquents avec le dérèglement climatique, ont affecté de nombreux bassins majeurs .

En France, à l’échelle d’une même région, l’impact climatique n’est pas le même et tous les producteurs ne sont pas touchés de la même façon, au même moment. Mais la filière française n’est pas suffisante pour tout le monde. Et partout, les volumes disponibles pour la transformation chutent, ce qui entraîne une flambée des prix. Le prix du sucre a également augmenté.

LMEF – Dans quelles proportions celles-ci impactent votre sourcing et vos coûts d’approvisionnement ?

V.I. – À La Cour d’Orgères, nous travaillons en grande partie avec des producteurs français et locaux. En Bretagne, notre région, nous avons eu la chance que les récoltes de fraises et de framboises soient correctes. Mais nous partageons l’inquiétude de nombreux artisans confituriers : si les industriels, confrontés aux baisses de récoltes à l’étranger, se tournent massivement vers la production française, la filière ne sera pas suffisante pour absorber cette demande. Le risque, c’est de voir apparaître des tensions fortes, voire des pénuries, qui pèseraient sur l’ensemble de la profession. Nous sommes surtout touchés surtout sur la griotte.

LMEF – Quelles conséquences sur les prix de vente ?

V.I. – À ce jour, nous n’avons pas répercuté de hausse sur nos prix de vente. Nous avons en effet pu, jusqu’à présent, maintenir nos coûts et stabiliser les tarifs de l’an dernier. Mais pour la fédération des artisans confituriers de France, la vigilance est de mise : les stocks de fruits sont limités et la spéculation des grossistes est une vraie menace. Si certains commencaient à constituer des réserves pour revendre à prix d’or, cela fragiliserait directement l’équilibre économique de nos ateliers et rendrait inévitable une augmentation des prix de vente au consommateur !

LMEF – Comment les artisans confituriers s’adaptent-ils ?


V.I. – Notre réponse se joue sur plusieurs axes. Nous renforçons les partenariats avec les producteurs français pour sécuriser les approvisionnements et soutenir l’agriculture locale. Nous diversifions les recettes et valorisons les fruits disponibles pour ne pas dépendre uniquement des filières les plus touchées. Cela nous oblige à varier les variétés et quand il n’y en a plus, on attendra la saison suivante…

Nous agissons collectivement au sein de la Fédération des Artisans Confituriers de France, pour alerter sur les risques de spéculation et défendre une juste rémunération des producteurs comme des artisans. Enfin, nous cherchons à préserver le consommateur en faisant tout pour contenir les prix, tout en garantissant une qualité artisanale et des recettes authentiques. Nous essaierons de rogner un peu sur nos marges mais cela ne sera peut être pas suffisant…


État des lieux des récoltes européennes de fruits

  • Fraises : pluies et gel en Pologne entraînent une baisse jusqu’à 50 % des volumes. Une forte demande en frais accentue la tension sur les disponibilités pour la transformation, avec des prix en hausse.
  • Framboises : le principal bassin d’approvisionnement (Serbie) pour les fruits à destination de la transformation, fait face à une sécheresse exceptionnelle (40 jours sans pluie) réduisant la récolte de moitié. Les prix sont donc en forte hausse sous l’effet d’une demande qui reste soutenue.
  • Abricots : en Espagne, pollinisation perturbée par les pluies et épisodes de grêle à répétition limitent fortement les récoltes et entrainent des hausses de prix majeures. En Grèce et en Turquie, le gel a également touché ces filières. La récolte italienne est aussi en baisse (prévisions à -19%), ce qui tend fortement le secteur de la transformation sur tout le bassin européen (ES, IT, GR, FR). Enfin, la récolte française est d’un bon volume mais avec de très bon calibre ce qui limite les débouchés industrie, et accroit encore la tension sur ce marché.
  • Cerises griottes : pour la seconde année consécutive, les récoltes sont dramatiquement basses en en Europe de l’Est avec des pertes de 30 à 80 % selon les pays. Le marché, déjà sous tension, voit les prix exploser en deux ans. À cela s’ajoutent des problèmes de qualité, laissant craindre des ruptures d’approvisionnement jusqu’à la prochaine récolte.
  • Cerises noires : le gel tardif a réduit drastiquement les récoltes en Grèce, Turquie et Bulgarie. Les besoins industriels ne seront pas couverts, avec des prix largement au-dessus d’une année normale.
  • Cassis : après une année 2024 catastrophique, la récolte 2025 reste très moyenne et ne permet pas de compenser les ruptures de l’an dernier. L’offre est inférieure aux besoins du marché. Les prix poursuivent leur envolée.
  • Rhubarbe : la situation est similaire à celle du cassis : après une récolte 2024 historiquement basse, la campagne 2025 reste très décevante. Les disponibilités pour la transformation sont limitées, avec des hausses de prix marquées dans un contexte de forte tension sur l’ensemble du marché.

Source : Fédération des Industries d’Aliments Conservés


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