mathieu viannay

Mathieu Viannay  » Lyon reste la capitale de la gastronomie « 

Chef deux étoiles aux commandes de La Mère Brazier, Mathieu Viannay est parvenu à redonner tout son lustre à cette mythique institution lyonnaise. Et plus que ça, puisqu’en ouvrant à Vaise.

Le Comptoir de La Mère Brazier, il nous démontre que les valeurs d’hier sont plus que jamais au goût du jour.

Le Monde de l’Épicerie Fine – Dans quel état d’esprit avez-vous repris La Mère Brazier il y a dix ans ? À Lyon, le poids de cette institution où Paul Bocuse avait ses classes, était particulièrement lourd.

Mathieu Viannay – Quand je suis arrivé ici, il a d’abord fallu tout refaire car la maison était vraiment très abîmée. En même temps, on a essayé de garder ce qui en faisait le charme donc l’idée était un peu de tout changer, sans rien changer ! Ensuite, je me suis demandé ce qu’aurait fait Eugénie Brazier si elle avait été vivante et je me suis glissé dans ses chaussons, sans faire de bruit. Ma cuisine avait déjà
évolué vers un certain classicisme contemporain où ce qui est classique ne l’est pas vraiment, et ce qui est contemporain non plus.

LMEF – Vous étiez-vous documenté sur le personnage ?

M.V Tout d’abord, j’avais beaucoup discuté avec Jacotte Brazier, sa petite-fille. Et beaucoup échangé aussi avec Paul Bocuse qui était ravi que je reprenne cette maison. Avant qu’on ouvre, il est venu ici, dans l’un des petits salons du restaurant, pour me dire ce que représentait La Mère Brazier, me parler de sa cuisine classique et généreuse et de son extrême exigence pour la qualité des produits.

LMEF – En dix ans, comment a évolué cette adresse ?

M.V – On a fait évoluer petit à petit la cuisine ; à présent, je ne réfléchis plus en fonction de tel ou tel élément, je fais ce que j’ai envie de faire. Je ne me dis plus : “Ça c’est Brazier, ça ne l’est pas…” ; je ne pense pas que je cuisinerais différemment ailleurs.

LMEF – En quoi les attentes de votre clientèle ont-elles évolué ?

M.V – Chez Brazier, on vient chercher l’excellence, mais aussi y retrouver quelques clins d’oeil à la grande cuisine lyonnaise, de grandes pièces rôties ou pochées comme les poulardes ; bref, une certaine idée de la restauration.

LMEF – Eugénie Brazier avait inspiré à Curnonsky cette affirmation qui a fait date : “Lyon est la capitale de la gastronomie.” Est-ce encore le cas ?

M.V – C’est plus que jamais le cas. La ville est très vive au niveau de la cuisine, beaucoup de jeunes y ont ouvert leur restaurant et si vous y retrouvez cet esprit si particulier, c’est parce que, comme il y a cent ans d’ailleurs, vous rassemblez autour de Lyon sans doute le plus grand nombre d’AOC en vins, fromages, viandes, volailles, légumes… Une richesse du territoire inégalée permettant d’expliquer l’intérêt que portent les Lyonnais aux choses de la table et qu’illustre bien cette maxime : “À Lyon, au travail on fait ce qu’on peut, mais à table on se force”.

LMEF – Vous avez ouvert plus récemment à Vaise, en périphérie de Lyon, Le Comptoir de la Mère Brazier. C’est un lieu mixte ouvert sur la gastronomie avec épicerie fine, boulangerie, pâtisserie, cave, espace de restauration. Comment l’avez-vous pensé ?

M.V – Au départ, l’idée était d’ouvrir une boulangerie charcuterie, après, ça s’est élargi à l’épicerie, la cave et ensuite à la restauration. Tout cela donne un lieu assez unique dans la mesure où 70 % du chiffre d’affaires provient de la vente de produits fabriqués sur place. C’est important. Le pain – toute notre boulangerie est en bio -, les viennoiseries, la pâtisserie, le pâté en croûte, le saucisson brioché, les terrines… sont réalisés sur place. L’épicerie, la cave et la charcuterie sèche proposent des produits sélectionnés pour leur qualité.

LMEF – Vous disposez donc d’un vrai laboratoire ?

M.V – Oui, sur 450 m2 dont 200 m2 dédiés à la vente et 200 à la production qui mobilise quatre boulangers, trois charcutiers… Ce qui plaît à la clientèle, c’est que nous fabriquons un maximum de produits sur place. Nous devrions atteindre deux millions d’euros de chiffre d’affaires cette année.

LMEF – On imagine que ce succès se fait au dépend d’autres commerces de proximité…

M.V – En face de nous est installée une sandwicherie qui fabrique du pain industriel, il y a un Casino… Alors si on a retenu de la clientèle çà et là, ça ne me gêne pas. Ensuite, c’est un lieu de vie ouvert 7 jours sur 7 de 8h à 20h et nous nous sommes adaptés aux attentes de la clientèle qui elle-même a évolué. Par exemple, nos clients comprennent que nos pâtés sont gris parce qu’ils ne contiennent pas de sel nitrité. Mon rêve, c’est que d’ici quelques mois, nous soyons capables de réaliser nos jambons blancs sans sel nitrité ; c’est l’avenir de la charcuterie, comme l’avenir de la boulangerie passe par le bio et un retour vers des farines non dopées…

Nous travaillons aussi beaucoup sur les circuits courts. Par exemple, nous préparons une gamme de vinaigres avec une petite productrice en Ardèche qui élabore des balsamiques merveilleux c’est une vraie collaboration.

LMEF – Eugénie Brazier était un personnage. Si La Mère Brazier devenait une marque, quelles seraient ses valeurs ?

M.V – L’authenticité et la qualité… Je n’imagine pas mettre son nom sur une mauvaise saucisse ! La Mère  Brazier est synonyme dans le monde entier, de qualité… Il faut préserver cette réputation ; si à l’ouverture nous avons obtenu des articles dans les médias de 80 pays sans le soutien d’une attachée de presse, ce n’est pas par hasard. La Mère Brazier a une authentique réputation.

Propos recueillis par Bruno Lecoq

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