fruits confits

Pas de trêve pour les fruits confits

JEAN-CLAUDE RIBAUT

 

Quelques rares artisans-confiseurs maintiennent la tradition du confisage de l’ancienne France qui connut son heure de gloire au XIXe siècle.

 

 

Le fruit, plongé dans une solution concentrée de différents sucres, subit une déshydratation par un phénomène d’osmose qui donne lieu à deux transferts simultanés : l’eau quitte peu à peu le fruit vers la solution concentrée, tandis que la solution pénètre dans le fruit. Cette méthode empirique est celle préconisée déjà par le mage confiturier Nostradamus (1503–1566) dans son Traité des Fardemens et Confitures. La difficulté réside dans la multiplication des bains de sirops différents – concentrés ou légers – dans lesquels les fruits doivent être plongés jusqu’à six ou sept fois – de trente secondes à beaucoup plus pour certains – et avec un temps de séchage naturel de plusieurs jours. Ainsi, confire un abricot, une fraise, une poire demande entre trois semaines et un mois, alors qu’à Apt (Vaucluse) l’industrie du fruit confit réalise l’opération en trois jours.

Retrouver le goût du fruit avant tout…

Chez quelques artisans, après ces opérations, le fruit passe encore deux mois dans un fruitier ; ce n’est qu’au moment de la commande qu’un bain de finition, appelé glaçage, suivi d’un ultime séchage sur grille, donne au fruit confit son aspect luisant et appétissant, ni trop ni trop peu sucré. Sans jamais avoir eu recours au E171 cancérigène (dioxyde de titane), désormais interdit. Chez ces rares professionnels, seule concession à la modernité, quelques concentrateurs, étuves et autres bacs en inox, tranchent avec les poêlons et bassines en cuivre toujours en usage depuis le temps où le charbon (coke) assurait la chauffe. “Ce que nous cherchons, c’est avant tout à retrouver le goût du fruit et à équilibrer le sucre”, dit Pierre Lilamand, confiseur à Saint-Rémy-de-Provence. Il n’y a guère dans ces entreprises de secrets de fabrication autres que cette connaissance empirique accumulée au fil des générations. Certes, la qualité des fruits et leur degré de maturité surtout importent : “Ils doivent juste virer, être à peine arrivés au mûrissement pour conserver leur texture” précise un chef de fabrication. La clientèle de l’épicerie fine aime ces produits : cerise, abricot, figue, melon, prune

 

cédrat, orange, clémentine, gingembre et kumquat, citron, fraise et poire… L’origine du confisage est liée à l’introduction en Europe par les Arabes de la canne à sucre “avec son cortège gastronomique de gâteaux aux fruits confits, de massepain et de nougat”, indique l’historien Jean-Louis Flandrin (Histoire de l’alimentation. Fayard. 1996).

 

Le marron glacé occupe une place à part. Avant de devenir, lui aussi, un produit industriel, plusieurs régions productrices de châtaignes ont conservé depuis parfois plus d’un siècle, leur savoir faire ancestral : en Ardèche (à Privas et Aubenas), à Collobrières (Var), à Aubagne, près de Marseille. Chez eux, la trêve des confiseurs n’est qu’un euphémisme, en vigueur dans le monde politique et la presse depuis 1875.

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