Le Monde de l’Épicerie Fine s’est procuré l’évaluation de la hausse des prix des 100 produits les plus vendus en magasins bio en 2022, établie par le panéliste Biotopia. Résultat : une inflation moindre que celle de l’ensemble des produits de grande consommation. Cette modération des prix du bio dans la distribution spécialisée ne suffit toutefois pas à enrayer le recul des magasins bio.
L’an dernier, la hausse des prix à la consommation a atteint des sommets en Europe. L’indice des prix dans la zone euro a en effet progressé de 9,2 % en glissement annuel. La France est certes un peu protégée avec une augmentation de 5,9 %. Mais elle atteint 12,1 % pour l’alimentation (9,3 % pour les produits frais). L’inflation est à peine plus modérée dans la grande distribution, où le prix moyen des produits grande consommation et frais en libre-service, s’est accru de 10,4 % entre décembre 2021 et décembre 2022, selon le panéliste NielsenIQ. Du jamais vu depuis le milieu des années 1980 ! NielsenIQ n’attend pas de stabilisation avant la mi-2023.
Beaucoup mieux que l'indice des prix
Dans ce contexte, les hausses de prix en magasins bio semblent se montrer plus modérées que celles des grandes surfaces alimentaires généralistes. En effet, selon les données communiquées par Biotopia, société d’études spécialiste du secteur, la hausse des prix à des 100 produits les plus vendus dans les magasins bio spécialisés, se limite à 5,2 %, soit 0,7 point de moins que l’inflation constatée en grandes surfaces généralistes par NielsenIQ.
« Ce sont principalement les catégories les plus chères du magasin qui sont pénalisées par la situation actuelle, moins le “fond de panier” », souligne Biotopia. Ce dernier constate que les clients des magasins bio tiennent beaucoup plus compte de la hausse des prix que l’an dernier, avec des intentions de limiter leur budget en forte progression sur toutes les catégories.
Moins de produits traiteur, de viande, de poisson
Ainsi, la part des clients des magasins bio qui disent chercher à limiter leur budget en produits traiteur est passée de 26 % à 62 %, propulsant la catégorie en tête de celles qui sont « sacrifiables ». La viande et le poisson suivent avec respectivement 56 % et 53 %. Tandis que l’épicerie sucrée et les boissons alcoolisées émargent à 50 %. Même les boissons sans alcool sont entrées dans le radar de la vie chère. Elles sont passées de 6 % à 44 % de clients des magasins bio prêts à limiter la dépense, soit un bond de 38 points en un an.
Les MDD prennent du poids en épicerie
Dans ce contexte, on n’est pas surpris de constater la progression du poids ventes de produits à marque distributeur (MDD) dans les magasins bio. Après avoir franchi la barre des 10 % à la fin 2021, ces produits plus accessibles ont encore gagné 0,7 point l’an dernier. « Tous les rayons sont concernés, en particulier les rayons du quotidien », constate Biotopia. La crémerie est le rayon où les MDD sont le plus présentes, avec une part de marché de près de 20 %. L’épicerie sucrée (11,9 %) et salée (10,2 %) suivent sur le podium. Cette dernière affiche la plus forte augmentation de part de marché depuis 2019 (+ 2,7 points).
Les hyper et supermarchés remballent le bio
Une évolution similaire s’est produite en grande distribution. Celle-ci s’est en effet recentrée sur les MDD, seule catégorie de marque qui progresse dans l’assortiment des hypers et supermarchés. Les ventes de produits bio y ont par ailleurs reculé. Selon le bilan annuel établi par NielsenIQ, la baisse est de 8,1 % en volume en 2022, dont 7,2 % au premier semestre. Les familles se sont en partie détourné du bio. Elles ont réduit leurs achats bio en hypers et supermarchés de 6,3 % en volume.
Les rivaux de l'AB grignotent le bio
Par ailleurs, la concurrence des présumées « alternatives » au bio se faire sentir. Les produits affichant zéro pesticide, se revendiquant « naturels » ou élaborés sans conservateur, etc., progressent de 6,1 % en chiffre d’affaires et 1,2 % en volume sur l’ensemble des circuits de la grande distribution généraliste.
Les autres spécialiste alimentaires progressent
Ces évolutions sont à rapprocher des données sur le comportement des consommateurs et l’évolution des circuits de distribution. Selon NielsenIQ, l’e-commerce est le canal de vente de produits de grande consommation qui a le plus gagné de clients entre 2019 et 2022 (+ 16,2 points à 57,7 % de taux de pénétration). Suivent les formats discount. Leurs progressions sont plus faibles mais ils partent de plus haut. Dans la distribution alimentaire spécialisée, les magasins de surgelés et les moyennes et grandes surfaces de produits frais gagnent en fréquentation. Au détriment, semble-t-il, des magasins bio qui ont perdu 2,6 points de taux de pénétration entre 2019 et 2022.
Des bonnes intentions à l'épreuve de la réalité
Malgré l’affaiblissement de leur pouvoir d’achat, les Français continuent de se sentir concernés par la « consommation responsable ». Près de quatre sondés sur cinq disent accorder de l’importance à la nutrition. Six sur dix se reconnaissaissent dans l’affirmation selon laquelle « consommer responsable est quelque chose d’important pour la société« . Ils essaient de faire des choix durables… quand ils le peuvent. Selon NielsenIQ, l’achat local et les emballages sont deux enjeux qui joueront un rôle majeur dans les prochaines années.
Des intentions aux actes, il y a toutefois un pas toujours facile à franchir. À peine un quart des consommateurs affirment que l’achat responsable est pour eux une priorité qu’ils mettent en œuvre au quotidien. Alors que Coca Cola est le fabricant qui a le plus progressé l’an dernier… Et l’innovation qui s’est le mieux vendue, Go Bubble Tea, est classée E au Nutriscore !
