Selon les prévisions du Conseil international oléicole, la production d’huile d’olive 2024 devrait baisser de 8 % à 2,4 millions de tonnes au niveau mondial à l’issue de la campagne 2023-2024, qui s’achève actuellement. Après le recul de 25 % enregistré l’an dernier, aucune détente n’est donc attendue sur les prix en 2024. Ceux-ci avaient enregistré une hausse à deux chiffres l’an dernier.
En Europe, la production européenne atteindrait 1,5 million de tonnes. En augmentation de près de 8 %, elle redresserait ainsi la tête. Mais pas au point de rattraper la baisse de 39 % de l’an dernier. À nouveau « confrontés à de fortes vagues de chaleur et à de faibles précipitations pendant la période estivale, aucun des principaux pays producteurs ne renoue avec les niveaux de production antérieurs à 2022 », souligne France Agrimer dans sa dernière note de conjoncture.
Un rebond de la production d’huile d’olive 2024 insuffisant
Premier producteur mondial, l’Espagne « donne le pouls du marché », rappelle Guillaume Saco, cofondateur de la marque Le Temps des Oliviers. Le pays a d’ores et déjà annoncé une prévision de 766 000 tonnes. Soit une hausse de 15 % par rapport à l’an dernier… qui aboutit à un volume à peine supérieur à la moitié de la production atteinte il y a deux ans.
Même constat, bien que de moindres proportions, pour l’Italie et le Portugal. La Grèce, en recul de 45 %, ne réitère pas la très belle performance de 2021-2022. Sur le reste du pourtour méditerranéen (Turquie, Tunisie, Maroc…), la production est également en recul par rapport aux niveaux atteints il y a deux ans. Dans ce contexte, les réserves mondiales diminuent et les cours restent orientés à la hausse.
La France n’est pas épargnée
La France n’échappe pas aux tendances globales. Sous les effets du changement climatique, la production nationale d’huile d’olive a chuté de 5 785 tonnes en 2021-2022 à 3 500 tonnes en 2022-2023. Cette année, la production française « semble globalement prometteuse », évalue France Agrimer. Elle pourrait progresser d’un quart pour atteindre 4 500 tonnes.
Les volumes varient selon les régions. Dans la Drome provençale, la récolte est annoncée comme « exceptionnelle », à la fois en qualité et en quantité. C’est notamment le cas près de Nyons, qui fêtera cette année les 30 ans de son AOP. Des pluies tombées au bon moment ont sauvé les récoltes d’olives en Languedoc. L’irrigation a limité la casse dans le Var. Mais les Pyrénées orientales ont souffert de la sécheresse et des restrictions d’eau.
En matière d’huile d’olive, la France est un pays de production haut de gamme et de consommation courante. Le marché français s’établit à 130 000 tonnes. La quasi-totalité (127 000 t) sont importées, principalement d’Espagne (65 %), d’Italie (22 %) et de Tunisie (10 %). Les huiles françaises AOP représentent plus de 30 % de la production mais seulement 4 % de la consommation nationale. Les vergers bio constituent 42 % de la surface oléicole exploitée. La région Sud représente 59 % de la production française, l’Occitanie 26 % et Rhône-Alpes 13 %.
Des quantités limitées réservées aux clients fidèles
Il n’y a pas vraiment d’échappatoire à cette baisse de la production. « En période de tension sur les approvisionnements, mieux vaut privilégier ses fournisseurs historiques quand on distribue de l’huile de qualité, explique Guillaume Saco, cofondateur du Temps des Olivier. Aller chercher d’autres fournisseurs, c’est prendre le risque de dégrader son offre et de décevoir les clients, d’autant que l’huile de qualité ne se conserve pas longtemps. »
Ce grossiste, qui s’est notamment distingué pour son engagement en faveur de la consigne, distribue des huiles vierges extra de propriétaires récoltants. Elles proviennent pour moitié d’Espagne mais aussi de d’Italie, du Portugal, de Grèce et de France. Le distributeur veille aussi à allouer au plus juste les quantités disponibles auprès de ses revendeurs fidèles.
Créée en 2019, la marque Oliv&Sens a moins de contraintes d’approvisionnement. Ce fabricant d’huiles d’olive monovariétales artisanales sélectionne des olives cultivées en France et les fait presser par un moulinier du Gard. La marque ne cherche pas à faire de gros volumes. « Nous étions inquiets au début de la récolte mais elle a été finalement suffisamment abondante pour satisfaire nos besoins », relate David Cornet, fondateur d’Oliv&Sens.
Des hausses de tarifs qui atteignent leurs limites
En revanche, la marque n’échappe pas à l’inflation. « Nous avons passé deux hausses en 2023 pour tenir compte de l’augmentation des prix de revient de l’huile d’olive ainsi que de celles des bouteilles et de la logistique », explique David Cornet. Après avoir augmenté d’un euro en moyenne l’an dernier, les prix bouteilles de 25 cl d’huiles monovariétales de cette marque créée il y a deux ans se sont donc stabilisées à 14,50 et 15,50 €.
Bien que les coûts logistiques et d’emballages continuent de grimper cette année, Oliv&Sens n’a pas pas procédé à de nouvelle hausse tarifaire cette année. « Notre marque n’est pas positionnée sur le luxe mais sur le premium. Les acheteurs de ce segment sont plus regardants sur les prix », commente David Cornet. Quand l’élasticité prix atteint ses limites, les producteurs n’ont d’autre solution que de resserrer leurs marges.