En prenant les commandes de Valini à Nîmes le 1er mai dernier, Rudy Aubert s’est lancé dans une aventure qu’il a méthodiquement préparée depuis près de dix ans : il est devenu torréfacteur !
Le Monde de l’épicerie fine – Quel a été votre parcours professionnel afin d’ouvrir votre boutique de torréfaction à Nîmes ?
Rudy Aubert – Le magasin était ouvert depuis 2017 et il s’agit d’une reprise qui s’est faite officiellement début mai, et officieusement depuis janvier pour une passation en douceur avec le prédécesseur. Mon parcours professionnel a été très axé sur l’agronomie et notamment, pendant plus de quinze ans, comme directeur commercial international pour plusieurs domaines viticoles dans le sud de la France.
LMEF – Comment s’est faite votre première rencontre avec le café ?
R.A – C’était en 2016, lors d’un voyage en Jordanie alors que je campais avec des amis dans le désert de Wadi Rum, en compagnie de Bédouins qui nous ont préparé un café à la turc. Cela a été pour moi comme une sorte de révélation et j’ai commencé à m’intéresser au monde du café dans sa globalité, à étudier l’étendue des possibilités qui s’offraient à nous en matière d’extraction, en termes aromatique et d’agronomie. Il y a beaucoup de points communs avec le monde du vin. Les années ont passé et j’ai décidé de franchir le cap.
LMEF – Où avez-vous appris le métier ?
R.A – Je suis parti dans plusieurs villes afin de me former avec des professionnels du café comme le MOF Mikaël Portannier. Et comme je voulais vraiment aborder tous les aspects du métier avant de me lancer, je suis aussi parti m’initier à l’analyse sensorielle et le café vert avec Ludovic Maillard et les Cafés Lomi à Paris. Actuellement, je suis en train de finaliser mes dernières formations – l’extraction douce – pour pouvoir avoir les cinq niveaux SCA.
“Je voulais pouvoir acheter mon café vert comme un vrai pro”
LMEF – Ces diplômes vous servent-ils au quotidien ?
R.A – Clairement. Je voulais vraiment pouvoir tout faire, du sourcing jusqu’à l’analyse sensorielle. C’est important de pouvoir choisir son café vert en connaissance de cause, savoir comment le torréfier et analyser ce que l’on va retrouver en tasse.
LMEF – Où achetez-vous votre café vert ?
R.A – Je passe par différents importateurs, notamment Belco et Algrano. Belco, c’est vraiment sur mon cœur de gamme et les produits phares de la boutique. Algrano, c’est l’opportunité de toucher de nano-lots qui sortent de l’ordinaire, des exclusivités avec des process un peu plus expérimentaux. Par conséquent, je peux me faire réellement plaisir en découvrant et en essayant de faire découvrir aux Nîmois le panel de possibilités olfactives et gustatives du café de spécialité. C’est énorme.
“Le café ne se déguste pas de la même manière en été qu’en hiver”
LMEF – Quelle est l’étendue de votre offre ?
R.A – Notre but est de proposer – à emporter ou à consommer sur place – neuf cafés qui soient totalement différents par leurs origines ou le type d’extraction – expresso ou extraction douce. Les cafés viennent d’Afrique, d’Asie et d’Amérique centrale. Je propose un blend et un déca. Sur neuf cafés, on en renouvelle une partie tous les deux mois et on en garde trois ou quatre un peu plus longtemps, mais pas plus de cinq mois. C’est aussi le jeu de la saisonnalité des cafés et je pense que les gens viennent ici pour ça : parce qu’aussi le café ne se déguste pas de la même manière en été ou en hiver. Et on se rend compte que ce que les clients viennent chercher chez nous, c’est aussi ça. C’est-à-dire que même si un café est super bon, qu’ils l’adorent, ils restent toujours ouverts à la découverte et cela, c’est aussi l’une de nos satisfactions au quotidien.
LMEF – Vous travaillez également avec les professionnels ?
R.A – Oui, c’est vraiment mon objectif et je travaille déjà avec plusieurs restaurants étoilés Michelin de notre région. Les chefs peuvent même venir ici pour créer leurs propres mélanges en lumière rouge (lumière idéale pour déguster). Pour cela, j’ai créé derrière un rideau, comme un mini-labo de cupping avec une table qui a la bonne taille et les outils qui permettent de respecter les protocoles. J’ai effectué récemment ce travail avec Masaki Nagao, le chef 2 étoiles à qui Pierre Gagnaire a confié les cuisines de l’hôtel L’Imperator où il est consultant et j’ai trouvé cela très enrichissant.
LMEF – Qu’est-ce qui vous apporte le plus de satisfaction dans l’exercice de votre métier ?
R.A – D’un point de vue purement égoïste, c’est de pouvoir découvrir quotidiennement de nouveaux cafés, et de voir la satisfaction du client à qui je les fais goûter. Nombreux sont les gens qui viennent à nous et découvrent le café de spécialité. Et en tant que fils de cuisinier, j’ai vraiment beaucoup de fierté à échanger avec des chefs et de voir qu’ils me suivent dans mes recommandations. Localement il y a de plus en plus de points de vente, commerces et restauration qui font appel à moi parce que je suis local et que je propose des produits avec une traçabilité parfaite et une complexité qui sort de l’ordinaire.
Valini – Torréfacteur Denîm – 23 avenue Carnot. 30000 Nîmes
Tél. 04 30 67 40 66. valini.fr