Fabien Ferré

Fabien Ferré : “Ma cuisine va à l’essentiel”

En décrochant trois étoiles d’un coup, Fabien Ferré – chef de La Table de l’Hôtel du Castellet à 35 ans – a fait l’évènement. Authentique et rigoureux, ce Bourguignon d’origine a devant lui désormais, un magnifique parcours qu’il peut envisager avec sérénité.

Le Monde de l’Épicerie Fine – Vous avez fait l’évènement cette année, non seulement parce que vous avez décroché 3 étoiles Michelin pour La Table du Castellet, mais aussi parce que vous êtes dans l’histoire du guide, l’un des plus jeunes chefs à décrocher ces 3 étoiles d’un seul coup. On suppose que vous ne vous y attendiez pas ?

 

Fabien Ferré – On a eu la chance d’avoir cet héritage que m’a laissé Christophe Bacquié, à savoir une maison 3 étoiles avec un cadre magnifique où je me sentais bien avec mes équipes. On a travaillé de manière décomplexée depuis son départ et j’ai eu la chance d’être entouré de talents formidables qui m’ont suivi dans ce projet. On a fait ce qu’on avait à faire, on l’a fait avec cœur, avec passion, avec beaucoup de générosité, et aujourd’hui, ce qui s’est passé n’est certainement pas le fruit du hasard : on a été percutant, on a été bon quand les inspecteurs ont su nous rendre visite et voilà, c’est magnifique !

LMEF – Lors de la cérémonie organisée pour la remise des étoiles à Tours, vous avez aussitôt remercié Christophe Bacquié avec qui vous avez travaillé dix ans. Que vous a-t-il apporté professionnellement ?

 

F.F – Une vision d’excellence, une rigueur sur la sélection des produits, la cohésion de l’équipe, ce sont mes valeurs depuis toujours. Je vais à l’essentiel, je cuisine les produits que j’affectionne, sans superflu, et je fais une cuisine lisible et cohérente, le consommateur n’a pas à réfléchir quand il la déguste.

 

LMEF – Ce n’est pas sa cuisine qui a été récompensée, mais bien la vôtre. En quoi est-elle différente ?

 

F.F – Je ne sais pas si on peut dire qu’elle est différente, même si bien sûr elle est singulière parce que, encore une fois, je vais vraiment droit au but – un produit d’exception, une belle cuisson et un jus pour faire le lien entre la pièce maîtresse et le reste. Le jus, c’est l’ADN de la gastronomie française. Il y avait peut-être plus d’éléments dans les recettes de Christophe, un peu plus de technique. Il y a sur ma carte, un plat – l’encornet à la provençale, marjolaine – qui illustre bien mon propos et qui, selon les clients, est un plat signature.

 

LMEF – Vous êtes Bourguignon d’origine. En quoi ces racines influencent-elles encore aujourd’hui votre cuisine des bords de la Méditerranée ?

 

F.F – Je suis petit-fils d’agriculteur et fils d’artisan, et j’ai grandi en Saône-et-Loire, et c’est sans le fait que j’ai toujours nourri une proximité avec les producteurs, les artisans, les paysans, les maraîchers et les vignerons, que j’ai pu l’appliquer ici. Peu importe le terroir, là où l’on est, il est important de mettre en avant les producteurs locaux.

 

LMEF – Quand on regarde votre parcours, on voit que vous êtes un homme de concours. Qu’est-ce que ces compétitions vous apportent ?

 

F.F – C’est le fait de se dépasser, d’aller toujours plus loin, d’être toujours dans la réflexion et les remises en question permanentes. La compétition nous fait sortir de notre zone de confort et j’aime bien ça. Je suis un homme de défi, que ce soit dans le sport ou la cuisine. Je fais souvent un parallèle entre le sport et la cuisine qui ont des valeurs qui sont proches. Et ce que j’aime dans les concours de cuisine, c’est que l’on se met un peu dans une bulle, comme un grand champion, un cycliste ou un joueur de rugby peu importe, avec pour objectif d’être le meilleur. 

 

 LMEF – Vous avez la chance de travailler dans un environnement ultra-privilégié.  Est-ce l’atmosphère idéale, voire indispensable, pour faire de la haute gastronomie ?

 

F.F – Non, la haute gastronomie peut s’épanouir ailleurs, mes confrères le prouvent tous les jours. Mais aujourd’hui, c’est une chance de travailler dans des conditions comme ça. On a la chance d’avoir une vue remarquable sur la mer d’un côté, sur le golf de l’autre, le parc : c’est vraiment un écrin qui nous sert plus qu’il nous dessert.

LMEF – Le chef que vous êtes utilise-t-il des produits d’épicerie fine dans sa cuisine ?

F.F – Oui, les fournisseurs sont d’ailleurs mentionnés sur la carte. De nombreux produits viennent de La Cambuse de Davide Dalmasso à Golfe-Juan dans les Alpes-Maritimes, la fleur d’huile d’olive vient du Moulin du Partégal à La Farlède dans le Var, l’huile d’olive citron vient du Domaine du Jasson à La Londe-les-Maures, la farine de châtaigne est celle de Samira et Jérôme Pierlovisi à Cutuli è Curtichjatu en Corse, et on a aussi du miel de la Miellerie de l’Oratoire au Castellet, de l’ail noir…

LMEF – Vous-même vous arrive-t-il de pousser la porte d’une épicerie fine ?

 

F.F – Dès que je le peux, j’adore aller à Sanary-sur-Mer où Guillaume Lecomte, un ancien chef de notre brasserie, a ouvert avec son épouse Chrystelle, “Olives & beurre salé”. C’est à la fois une épicerie fine, un traiteur, une pâtisserie, et l’on y trouve notamment un large choix d’épices, de l’huile d’olive, de la poutargue… ainsi qu’un excellent pâté en croûte.

 

LMEF – Auriez-vous un conseil pour les épiciers fins qui nous lisent ?

F.F – Je n’ai pas de conseil à donner, mais je voudrais leur dire de faire leur métier avec plaisir et passion. Qu’ils mettent tout leur cœur à sourcer les meilleurs produits et à en parler.

Propos recueillis par Bruno Lecoq

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