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(Re)découvrir les salaisons de bœuf

Aujourd’hui, les salaisons de bœuf n’apparaissent guère dans les chiffres de la production française de produits carnés. On sait que la consommation de viande bovine régresse sensiblement depuis plusieurs années, tendance aggravée par le confinement du printemps 2020. L’observation se complique car les salaisons, pour des raisons historiques, relèvent du domaine de la charcuterie.  

Les salaisons artisanales de viande de bœuf subsistent heureusement dans plusieurs régions françaises, sans toutefois connaître la notoriété de certains produits importés. Qui connaît le “brési” (braisi ou breusi), charcuterie traditionnelle à base de viande bœuf salée et fumée en “tuyé” de la cuisine franc-comtoise du Haut-Doubs ? Pas grand monde sans doute, alors que la viande des Grisons ou du Valais en Suisse et la bresaola italienne sont appréciées en France. Le brésiest fabriqué à partir de pavés de viande de bœuf de race Montbéliarde et Simmental française, salés au sel sec, parfois frottés d’aromates (thym, laurier, girofle, genièvre) avant de subir un séchage et un fumage (résineux). Le brési accompagne surtout la fondue et la raclette. On le sert aussi à l’apéro. 

L’offre de bœuf cru séché dans notre pays est plutôt confidentielle.

Elle émane de rares éleveurs qui se sont lancés dans la vente directe grâce aux Marchés de Producteurs de Pays ou du Pari Fermier. Impossible de les citer tous, mais je me souviens par exemple qu’au Parc Floral de Paris, j’ai pu déguster la production de Benoît et Laurent Pissavy, dont l’élevage d’une centaine de vaches mères (Salers) évolue entre 1 100 et 1 400 mètres d’altitude. Les deux frères sont parmi les rares éleveurs de Salers à transformer leur viande sans intermédiaires, qu’il s’agisse en frais du pavé, ou du saucisson de bœuf et du bœuf salé et séché. Une démarche comparable mais en Basse-Corrèze a conduit Laurent Charieras et Marie-Noëlle Delbos à mener de front la conduite d’un élevage de 290 animaux (essentiellement vaches Limousines) tout en effectuant depuis 2010, la découpe, la transformation et la commercialisation de leur production tournée vers la vente directe (Pari Fermier et circuits courts).  

Dans le Velay à Saint-Romain-Lachalm, Emmanuel Chavassieux s’est fait connaître par quelques produits d’exception. Moins connue est sa production de bœuf salé, séché, affiné qu’il décline sous plusieurs présentations que nous avons dégustées chez Fine l’Épicerie (30 rue de Belleville à Paris 20e). Le bœuf Shoyu mariné, séché, d’une couleur naturelle homogène, présente une mâche d’une douceur rare avant d’exprimer une texture sapide et franche. La salaison de bœuf frotté au poivre vert établit une surprenante harmonie gustative, la viande prenant lentement le dessus sur la note poivrée. Le bœuf séché nature, sans doute le plus classique de cette production, porte des nuances très fines de noix, de cumin et de réglisse et quelques notes boisées. Emmanuel Chavassieux recommande d’utiliser une machine à trancher de qualité pour obtenir la finesse indispensable à une bonne dégustation. 

Jean-Claude Ribaut 

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