Dès le 12 juin prochain, les consommateurs vont pouvoir rapporter leurs bouteilles consignées dans quelque 750 magasins des régions Pays de la Loire, Bretagne, Normandie et Hauts de France. Un véritable tournant pour la relance de la consigne en France, disparue du commerce de détail sur l’ensemble du territoire à l’exception de l’Alsace.
Quelque 16 millions d’habitants de ces quatre régions auront ainsi accès un système mutualisé d’emballages réemployables en verre, baptisé ReUse. Citeo, l’organisme chargé de coordonner et de valoriser la collecte des emballages, a dévoilé les modalités concrètes de ce test à très grande échelle le 27 mai dernier à Paris au cours du salon du même nom. Les régions ont été choisies pour leurs performances en matière de tri et de recyclage des emballages et leur densité en infrastructures de lavage et transport de contenants alimentaires.
20 centimes de consigne pour une bouteille
À partir du 12 juin 2025, 55 millions d’emballages réutilisables seront donc mis sur le marché dans ces quatre régions. Les consommateurs pourront en faire usage en s’acquittant d’un montant de 10 centimes pour les petits formats (bouteille de 33 cl par exemple) et 20 centimes pour les grands formats (bouteille de 75 cl ou 1 l). Ces contenants pourront être rapportés et « déconsignés » dans un magasin participant autre que celui où il a été vendu.
Plusieurs systèmes ont été conçus pour assurer la collecte en magasin. Les plus grandes surfaces pourront s’équiper de machines de grande taille. Elles assureront la récupération des différents emballages de manière automatisée. Dans les plus petits points de vente, la collecte pourra se faire manuellement avec stockage dans de simples bacs. Un lecteur tablette permettra d’enregistrer la déconsigne. Dans les deux cas, les enseignes ont le choix soit d’éditer un bon d’achat soit de créditer la carte de fidélité du client.
Une signalétique complète en magasins
En magasin, une signalétique complète a été prévue pour désigner les produits sous emballages réemployables aux clients. Elle se composent de stops-rayon et étiquettes prix de couleur violette indiquant l’existence du produit et le montant de la consigne. Des autocollants fixés sur le produits les complètent.
Au choix du fabricant, les emballages sont soit des contenant standardisés dits R-Coeur spécialement conçus dans le cadre de l’expérimentation soit leur propres emballages. En pratique, ce sont principalement les produits à marques de distributeur qui emploient les emballages standardisés. Tous répondent cependant à des critères spécifiques (solidité supérieure à celle d’un emballage unique, décollage des étiquettes, etc.) afin de permettre leurs transport, lavage et réutilisation.
La distribution spécialisée en pointe avec Biocoop
Une bonne cinquantaine metteurs en marché sont engagés dans cette expérimentation grandeur nature. Ce sont surtout les acteurs de la grande distribution et de la grande consommation qui sont engagés. Les brasseries Heineken et Meteor, les eaux minérales de Danone, l’embouteilleur Refresco en font ainsi partie aux côtés de Carrefour et Coopérative U.
La distribution spécialisée est représentée par Biocoop. Pionnière du réemploi, l’enseigne de produits bio propose déjà 130 références sous emballages réemployables. Principalement disponible sur les formats bouteilles (vin, bière, kéfirs, kombuchas, limonades, sauces, etc.), son offre tend à se développer vers de nouveaux formats d’emballages et de nouveaux produits. Près de 600 points de vente du réseaux sont points de collecte. L’enseigne prévoit que la totalité de 740 magasins le soit d’ici à la fin de cette année 2025.
Des initiatives en cours pour le petit commerce
Hormis les initiatives individuelles d’indépendants engagés, le petit commerce de proximité et les commerces de bouche reste pour le moment à l’écart de la relance de la consigne en France. Mais certains opérateurs réfléchissent à des solutions adaptées à leurs contraintes. Ainsi sur le salon, la société Noww présentait un collecteur de faible emprise au sol (moins de 0,5 m2) pour les supérettes.
Du côté des producteurs, une association de viticulteurs bordelais, Bordeaux Altitude, pratique la consigne avec un modèle de bouteilles réemployables qu’elle a développée elle-même. Les étiquettes y ont été remplacées par une sérigraphie, ce qui réduit les contraintes de lavage (réalisé à Nantes par la société Bout à Bout). Bordeaux Altitude déploie son offre consignée en partenariat avec le réseau de distributeurs-grossistes de boissons C10 dans le secteur de la restauration mais aussi auprès de cavistes, parmi lesquels des franchisés Comptoirs des Vignes (qui appartient à C10).
La massification, clé de la relance de la consigne
Selon Thomas Poitevin, cofondateur de Bordeaux Altitudes, une bouteille à usage unique coûte 80 à 90 centimes contre 1,30 à 1,40 euro pour une bouteille consignée, auxquels s’ajoutent 20 à 30 centimes de lavage. Cette dernière pouvant être réemployée jusqu’à sept fois. Dans ces conditions, le succès de la massification de la consigne dépendra du pourcentage de bouteilles réellement remises dans le circuit. Et donc de la propension des consommateurs non seulement à en acheter mais aussi à les rapporter en magasin.