Attendu par les consommateurs, l’étiquetage de l’origine des produits alimentaires va commencer à apparaître en magasins dès cet été sous le nom d’Origin’Info. Reste à savoir s’il fera rapidement école et parviendra à rallier les plus grandes marques.
Mea-culpa. En octobre 2023, j’avançais que l’étiquetage de l’origine des produits alimentaires promu par le Collectif En Vérité serait un projet de longue haleine, faute de véritable soutien des pouvoirs publics. Depuis, la crise agricole a conduit ces derniers se saisir du sujet. En février, le Premier ministre Gabriel Attal s’engageait en sa faveur. Sa ministre des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation, Olivia Grégoire, lançait dans la foulée une concertation. Celle-ci a abouti, le 25 mai dernier, à l’adoption d’un dispositif volontaire par 82 marques et enseignes.
Le dispositif a été baptisé Origin’Info et non Origine-Score. Ce vocable, employé dans un premier temps par Olivia Grégoire, a été abandonné, afin d’éviter de donner à croire que le but était de noter les produits en fonction de leur lieu de production. Il s’agit plutôt, comme le communique le ministère, de garantir une information « neutre et factuelle » et d’écarter donc la notion de notation. Il s’appuie sur une charte inspirée d’un avis du Conseil national de la Consommation de 2021.
Trois options pour Origin’Info
Les marques signataires ont le choix entre trois options. La première consiste à indiquer l’origine des trois principaux ingrédients « primaires » (les arômes et additifs n’étant pas considérés comme tels) par ordre pondéral décroissant. La deuxième y ajoute, pour les produits transformés, le lieu de fabrication. La troisième affiche les trois principaux ingrédients sous forme de camembert avec indication du lieu de transformation.
La mention UE ou non UE n’est admise que dans le cas où le nombre de pays d’origine est supérieur à quatre. Une zone géographique supranationale ou un continent pourra alors être indiquée. L’adhérent s’engage par ailleurs à n’utiliser un drapeau français pour caractériser l’origine d’une denrée ou d’une étape de fabrication que lorsque l’ingrédient primaire est bien français en allant jusqu’à la matière première agricole. Ainsi, le mélange en France de plusieurs matières premières agricoles étrangères ne pourrait être assimilé à du made in France.
Affichage sur l’emballage ou en ligne
La démarche permettra ainsi d’améliorer l’information des consommateurs et « de lutter contre certaines pratiques trompeuses », souligne le ministère. Le dispositif sera en effet plus fiable que tous les drapeaux bleu-blanc-rouge, iconographies cocardières et autres formulations floues autour des produits français.
L’information des consommateurs pourra emprunter plusieurs modalités, au choix de la marque : directement sur les emballages des produits, sur les étiquettes électroniques en rayon, sur les sites de drive des enseignes ou via un QR code. Les premiers affichages devraient être visibles d’ici la fin de l’année 2024. Il pourrait concerner, d’ici la fin de l’année, plus de 10 000 références.
Les trois principaux ingrédients seulement
Grand promoteur de la démarche, Le Collectif En Vérité se réjouit de ce coup d’accélérateur. « Nous étions poliment entendus, le fait qu’une ministre se saisisse du sujet a fait bouger les lignes », relate David Garbous, président cofondateur de l’association, qui regroupe 60 marques alimentaires engagées pour la transparence des produits.
Le Collectif regrette toutefois que seuls les trois principaux ingrédients et non pas tous les ingrédients primaires aient été retenus (à l’exception des miels qui devront mentionner tous les pays d’origine). Le Collectif espère aussi que l’option 3 « avec camembert » s’imposera.
L’option 3 soutenue par le Collectif En Vérité
Une simulation de « label info origine » avec camembert testée par sondage l’an dernier sur trois produits avait provoqué une multiplication des intentions d’achats par 2 à 10 sur deux d’entre eux. S’il sait que « cette option camembert fonctionne », le Colllectif n’a « aucune certitude sur la capacité de la première option à mobiliser les consommateurs. Nous espérons que la liste des 80 membres va s’agrandir rapidement comme cela s’était passé pour le Nutriscore. À ce titre, nous donnons rendez-vous pour le point d’étape prévu à Bercy courant juin. »
Parmi les 80 marques alimentaires signataires de la charte Origin’Info, 41 sont adhérentes du Collectif En Vérité. Le label fédère de nombreuses petites marques principalement bio, quelques signatures de coopératives françaises (Daddy, D’Aucy, Priméal) et des groupes familiaux cotés (Fleury Michon, LDC) ou non (Olga). Toute la grande distribution française est également sur les rangs, ainsi que Biocoop et Naturalia.
Les multinationales aux abonnés absents
À l’inverse les multinationales de l’agroalimentaire ne se bousculent guère pour la transparence sur l’origine des produits. Danone n’est représenté que par Lait2Vaches, sa filiale de produits laitiers bio. Et nulle grande marque de Nestlé ou Mondelez ne s’est engagée pour Origin’Info. « Certaines d’entre-elles étaient pourtant présentes à l’origine de la démarche », assure pourtant David Garbous. Ce dernier veut croire que « la longueur des processus de décisions de ces grands groupes » les a empêchés de se positionner dans les temps… L’avenir dira si c’est vraiment le cas.
« J’invite désormais toutes les marques à rejoindre cette démarche », déclare Olivia Grégoire. Mais sans les plus grandes, pourra-t-elle vraiment faire école ? « Ce mouvement d’adhésion volontaire est critique car sans lui, ce sont d’autres dispositifs législatifs plus contraignants qui vont s’imposer, comme celui initié par Richard Ramos qui a obtenu un soutien transpartisan très large des députés de l’Assemblée Nationale le 17 mai dernier », note David Garbous, cofondateur et Président du Collectif en Vérité.
Les députés en embuscade
Les députés ont en effet adopté un amendement au projet de loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole présenté par Richard Ramos (Démocrate). Le gouvernement ne soutient pas cet amendement qui devra être examiné par le Sénat. S’il était adopté, il pourrait également faire l’objet de recours devant le Conseil d’État.
En attendant, le Collectif En Vérité s’apprête à reprendre sa feuille de route. Il commence à associer les consommateurs à sa cause en recueillant des adhésions directes. Une dizaine de personnes se sont déjà acquittées spontanément de leur cotisation annuelle (50 €). Le Collectif s’ouvre également à la distribution. L’enseigne engagée Biocoop est la première à l’avoir rejoint. D’autres devraient suivre. L’association devrait ainsi se doter à la rentrée d’un collège consommateur et d’un collège distributeur.
Vers un « logo intégral » ?
Le Collectif En Vérité soutient par ailleurs le Planet-Score et participe aux discussions sur le projet d’affichage environnemental. Un peu éclipsé par Origin’Info, ce dossier devrait rapidement être réactivé par le gouvernement. « Nous plaidons pour la coexistence des deux », explique David Garbous. Le Collectif En Vérité travaille à d’un « logo intégral » (Nutrition, Origine et Environnemental) qu’il espère pouvoir proposer en septembre.
Le Collectif En Vérité soutient par ailleurs le Planet-Score et participe aux discussions sur le projet d’affichage environnemental. Un peu éclipsé par Origin’Info, ce dossier devrait rapidement être réactivé par le gouvernement. « Nous plaidons pour la coexistence des deux », explique David Garbous. Le Collectif En Vérité travaille à d’un « logo intégral » (Nutrition, Origine et Environnemental) qu’il espère pouvoir proposer en septembre.